"SUPERSLIP"

C'est la BD de Camille Saféris et Philippe Chauvet (publiée dans l'Echo des Savanes).
Après un premier album en 2001, "Seul contre toutes", puis "Seul avec nous deux" en 2003,
le journal intime du célibataire Grégoire en quête perpétuelle de l'âme soeur continue dans un tome III paru
chez Albin Michel, "SUPERSLIP, L'HOMME QUI AIMAIT LES STRINGS"



Grégoire est comme nous : « beau, intelligent, taillé pour l’amour et foncièrement romantique ». Alors qu’est-ce qui cloche ? Pourquoi n’arrive-t-il pas à cohabiter avec la sublime Sylvie, lui préférant son hamster Mounette ? Pourquoi Grégoire est-il toujours si prompt à tout gâcher à cause d’une jolie fille qui passe ? D’où lui vient ce goût délicat d’offrir à sa fiancée des accessoires SM pour la Saint-Valentin ? Pourquoi drague-t-il éhontément sa future belle-mère ? Pourquoi veut-il essayer, avant de l’acheter, de faire crac-crac sur le clic-clac dans le magasin ? Pourquoi refuse-t-il de dire « Je t’aime » à Sylvie au téléphone, sous prétexte qu’il est en réunion marketing et que tout le monde l’écoute ? Oui, pourquoi ?... Peut-être parce qu’en effet, Grégoire est comme nous. En pire.



Actuabd.com (avril 2003)

"C'est sûr, Dupuy et Berberian ont fait des émules. Les graphismes, visiblement inspirés de ceux du célèbre duo, illustrent impeccablement des tranches de vie qui pourraient être celles d'un cousin égocentrique et maladroit de Monsieur Jean. Mais, s'il faut avoir un maître, autant choisir le meilleur, et on ne reprochera pas aux deux auteurs ces références trop nettes, car les aventures du jeune Grégoire, journal intime d'un trentenaire mal dans sa peau, en quête à la fois de lui-même, d'une identité et d'une âme soeur, est un petit bijou. Sorte de "Journal de Bridget jones" au masculin. Drôle, bien tapé et terriblement vrai".




"L'Echo du Lezard" (septembre 2001) — Interview des auteurs

Quels ont été vos itinéraires, dans le monde de la BD et en-dehors ? Quelles sont vos influences ? 

Philippe Chauvet — L’univers dans lequel j’évolue principalement est celui de l’illustration, du livre pour enfants et du livre scolaire. J’aime beaucoup dessiner pour les petits, mais dès que j’ai cinq minutes, je me mets à faire des pin-ups. C’est d’ailleurs pour ça que je suis souvent demandé en pub ou en presse : parce que je dessine bien les belles filles ! En ce qui concerne mon " trait ", je suis surtout marqué par la ligne claire, "Spirou années 50", Chaland, J'aime Hernandez et tous les mecs qui dessinent des pin-ups. Ma première expérience de BD date d’il y a une dizaine d’années : avec le scénariste de Franck Le Gall, j’ai publié quelques pages au style poético-rêveur dans un fanzine, Circus. J’ai trouvé cet univers très difficile, très exigeant : sur une page de BD, il y a toujours six cases qu’on n’a pas envie de dessiner. Si j’ai choisi d’y revenir, c’est parce que cette fois-ci avec Camille, on a vraiment voulu se faire plaisir?

Camille Saféris — Depuis très longtemps j’avais envie de me lancer dans la BD, j’avais bossé avec des dessinateurs pour mes premiers bouquins. Avec Philippe, on s’est rencontrés sur ce projet. J’aime beaucoup son trait. On ne fait ni une oeuvre au vitriol, à la Reiser, ni de l’art ou de la BD "sérieuse" : on fait de la potacherie qui nous fait rire, avec des filles à poil. Mais il y a quand même quelques influences incontournables : sans Jean-Claude Tergal et quelques autres, je n’aurais sans doute jamais eu envie de faire de la BD. Je me suis tourné vers la fiction à travers les livres et les sketchs que j’ai écrit pour la télé. Dans mes bouquins, je ne racontais pas encore d’histoire à proprement parler, il y avait simplement un terreau où cultiver la fiction. Puis j’ai découvert l’image en réalisant deux courts-métrages. C’est une évolution tout à fait logique dans mon parcours. Ce que je trouve formidable dans la BD, c’est que c’est du cinéma ? pas cher ?. Par exemple, si je décide qu’il me faut 12 filles nues sublimes et 15 chameaux devant les pyramides, il n’y a rien de plus facile en BD, tandis qu’en cinéma ça me posera quelques problèmes?

Quels choix graphiques avez-vous faits dans “ Les Aventures du jeune Grégoire ” ?

Ph.C — Il y a un parti pris de décalage dans le trait, avec du bleu pour tous les moments où le héros rêve. D’ailleurs ce héros lui-même est décalé par rapport à beaucoup de choses qui se font en BD. Ce n’est pas un personnage de séducteur, ce n’est pas un don juan, c’est un petit gros, toujours entouré de jolies filles. Il évolue dans un format qui est celui de la bande à quatre strips, ce qui est relativement exigeant, avec des décors très dépouillés. C’est l’un des paradoxes sur les quels nous avons travaillé : le dessin et les attitudes sont simplifiés, naïfs, alors que les personnages ont des préoccupations adultes, avec des situations de drague et des héroïnes plutôt girondes.

CS — La BD, c’est l’image arrêtée : il faut choisir la “ photo ”, l’instant qui concentre le plus d’information, d’émotion. Il faut aller à l’essentiel, suivre un chemin implacablement précis. Ça influe sur ma façon d’écrire au cinéma. Avec Philippe, on est tous les deux serrés sur ce qu’on a à raconter, sobrement. C’est une rencontre artistiquement très jouissive, on s’amuse beaucoup. En ce moment, on termine les encrages, on travaille directement sur ordinateur, on en profite pour corriger un regard, une expression, un détail. C’est prodigieusement amusant de faire vivre le dessin de cette manière.

Comment est né le personnage de Grégoire ? Comment évolue-t-il ?

CS — Dans mon livre Le Manuel des célibataires, il y avait, en filigrane, un personnage, comme un narrateur, qu’il ne restait plus qu’à faire exister en lui donnant un visage et un nom. C’est une sorte de Tintin de trente ans, un naïf qui a des poignées d’amour et qui perd ses cheveux, il ne lui reste plus que la houppette. À la différence de Tintin, c’est un obsédé sexuel. Ce personnage, c’est un outil formidable qui permet de dire plein de choses puisque tout le monde s’y reconnaît : les mecs, parce qu’on a tous un côté “ adolescent attardé ”, et qu’on est tous un peu désemparé devant les filles qui, de leur côté, connaissent toutes un type comme ça, un “ incasable ”. Grégoire est confronté au grand drame de l’homme moderne : les femmes, la cohabitation, le dialogue… Il incarne l’impossibilité complète pour un homme de communiquer avec la gent féminine, pour la simple raison que les hommes et les femmes veulent la même chose, mais ne le disent pas de la même manière.

PC — Ce qui nous a semblé intéressant, c’est de développer une série où le personnage va évoluer. Ce ne sera pas un héros immuable, figé une bonne fois pour toutes… Grégoire ne restera pas toute sa vie célibataire. Dès la fin du premier album on imagine qu’il va se mettre en ménage, et la suite devrait mettre en scène la vie de couple. Mais chut ! Top secret…

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